"L’idéal
est pour nous ce qu'est l'étoile pour le marin.
Il ne peut être atteint mais il demeure un guide".
Il ne peut être atteint mais il demeure un guide".
Albert
Schweitzer
Photo du film "Milarepa, la voie du bonheur."
Comprendre
n’est pas seulement un exercice rationnel et intellectuel. On comprend surtout lorsque l’on est capable d’inventer. Il n’y a pas de compréhension sans
création. Et il n’y a pas de création sans prise de risque. C’est pourquoi, la
création est phénomène de possession, dans le sens ou la possession initiale de
toute chose est entre les mains de celui qui l’a crée...
Dieu a-t-il
créé « l’Homme »? L’Homme a-t-il créé «Dieu» ? La question
reste pendante entre ceux qui ont « tué dieu » et ceux qui aspirent à être
créés par Dieu donc « possédés » de Dieu.
Ce que Jung a appelé « imago dei »
est un «archétype » c'est-à-dire un concept nécessaire à l’Homme pour commencer
à entrevoir le mécanisme de la création. L’Homme procréé parfois dans la plus
radicale inconscience. S’il veut créer, l’homme doit acquérir la conscience de
son acte. En créant, l’homme se place à l’égal de Dieu. Cela peut entrainer
quelques « errances » qui vont tour à tour le rapprocher ou l’éloigner de sa
route.
On observe
par ailleurs que l’acte créatif se caractérise par la fulgurance de l’idée et
se manifeste en dehors de la raison qui ralentit le processus intellectif[1].
La Croix symbolise ce que le mécanisme de la vie, c'est-à-dire de la création,
a de plus constant : l’opposition.
Sans
opposition, le mouvement vital n’existe pas. Voilà pourquoi la principale
ambition de l’homme sage est l’équilibre. Son symbole universel est le fléau de
la balance : instable par nature, variant perpétuellement entre la gauche et la
droite, le fléau stabilisé montre la voie du milieu.
L’Humain
sans cesse en action, perpétuellement instable, doute, vacille, tombe, se
relève. En se relevant, il aperçoit forcément l’Etoile. Son Etoile, qui brille
tour à tour timidement ou franchement : comme une toute petite croix à
l’horizon, comme une immense pentagramme au Zénith de sa tête. [2]
La barre
horizontale de la Croix symbolise le Temps, la Terre, l’Orient et l’Occident,
l’immanent, l’Humain. La barre verticale de la Croix symbolise l’Espace, le
Ciel, le Nadir et le Zénith, le transcendant, le Divin.
Dans un
monde duel, l’ensemble des concepts se classent par opposition, tantôt
contraires, tantôt complémentaires. On constate cependant qu’ils ne peuvent
être opposés qu’en respectant leur polarité (complémentaire ou contraire, + ou
-). On ne parle d’opposés qu’en termes de polarité semblable.
En d’autres
mots, il n’est possible de les opposer deux à deux que dans la mesure où le
premier possède la même polarité que l’autre. Au moment même où nous constatons
leur différence, nous sommes contraints de constater leur similarité…
Complexité du vivant, pied de nez du divin : l’homme n’est jamais si proche de
Dieu que lorsqu’il tend vers l’Humain. On pourrait aussi dire : l’homme n’est
jamais plus inhumain que lorsqu’il tend vers Dieu. D’où l’on peut déduire
quelques valeurs fondamentales du vivant :
- · Nécessité de respecter la « nature des choses ».
- · Nécessité de s’incliner devant plus grand que soi.
- · Nécessité d’accepter sa petitesse devant l’immensité de l’Univers.
- · Et l’on en vient à méditer sur l’illusion suprême de ce monde : le pouvoir.
Nulle
illusion plus grande que de croire au pouvoir de l’Humain sur la matière.
La grandeur de l’Humain tient toute entière dans la prise de conscience de
ce paradoxe : l’Humain n’est jamais plus grand que dans la prise de
conscience de sa réelle petitesse. Il n’est jamais plus petit que baignant dans
la vanité de sa croyance en ses pouvoirs temporels. La seule ambition favorable
à l’Humain, ici-bas, est de ne pas ignorer l’Esprit lorsqu’il se manifeste à la
conscience car, « c’est bien par sa
conscience que l’Homme est relié au Divin ».
Celui qui
n’a pas encore été touché par cette évidence, ou qui l’a oublié, à la faculté
de se laisser guider par son étoile. Encore faut-il accepter de lever les yeux
au ciel pour la contempler. Et dans cette « contemplation », la racine du mot «
Temple » lui sautera à l’esprit comme le diable de sa petite boite… Ce temple
extérieur qui s’oppose ou qui complète notre temple intérieur est une prolongation
du secret de l’Etoile.
[1] A ce sujet, on peut comprendre raison
comme « raisonnante » (qui réfléchit ou freine l’acuité de la « vision » ) ou «
résonnante » (qui fait du bruit et brouille ou favorise la prise de conscience,
à chacun son choix.)
[2] Remarquons que lorsque nous la
regardons alors qu’elle est placé au Zénith de notre tête, l’étoile à cinq
branches n’a pas de sens réellement défini, hormis dans la conscience de celui
qui l’observe… ce qui n’est pas le cas lorsque nous la regardons sur la ligne
de fuite de l’horizon. D’où la nécessité de bien regarder les choses au niveau
où nous pouvons les comprendre.
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Se laisser guider par son Etoile, pas facile; il faut d'abord croire que ce guide intérieur existe. Carl Jung a été mon principal professeur sur ce chemin pas facile mais fascinant qu'est le processus d'individuation. Pas à pas, des points de repère me sont apparus, fil d'Ariane m'aidant à cheminer dans mon labyrinthe. Cette guidance, devenue évidente au début des années 80, ne m'a jamais fait défaut par la suite. Quel nom lui donner, à ce Guide? Ce qui s'en rapproche le plus, je dirais que c'est la notion de Tao, qui ne donne pas l'impression d'un Etre surnaturel, mais plutôt d'une puissance impersonnelle et présente partout et toujours.
RépondreSupprimerMerci pour ce très intéressant article!
Amicalement,
Michelle
Michelle, votre intervention sur le Tao me parait fort à propos quand on parle de la voie de l'étoile. "Carl" n'aurait sans doute pas déjugé votre approche, lui qui fut littéralement "envoûté" par la pensée extrême orientale. Il faudrait donc parler ici du I King. Merci de votre visite et à bientôt, peut être ?
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