samedi 28 janvier 2012

A propos de la Tolérance


"Exister est un fait, vivre est un art.
Tout le chemin de la vie,
c'est passer de l'ignorance à la connaissance, de la peur à l'amour".
Emmanuel Levinas



La tolérance est une vertu.
Personne ici ne remettra cet axiome en cause. C’est une vertu mais ce n’est pas une notion manichéenne. Il est donc inutile et dangereux de parer cette vertu de la qualité de Bien ou de Mal. En d’autres termes, la tolérance nous aidera à supporter l’insupportable mais elle ne nous permettra jamais de transcender ce qui relie en nous le ciel à l’enfer.



Tolérer c'est supporter. Tolérer un mal, pour éviter qu’un mal plus grand ne naisse de notre intolérance... cela ne signifie pas qu’il faille tolérer l’intolérable. Il existe un violent malentendu qui oppose tenants de la tolérance contre tenants de l’intolérance. 
Dans la bonne société les classements vont bon train. Si vous n’êtes pas d’un bord, vous êtes forcément de l’autre. C’est pour éviter cet amalgame que les votes démocratiques s’expriment à bulletin secret. Il s’agit de compenser la facilité avec laquelle nous pouvons être amenés à classer l’autre, celui qui ne pense pas comme nous, dans le rang des intolérants.

Si l’on veut essayer de comprendre ce que signifie « tolérer », il faut d’abord cesser de procéder par classification. Comme pour le Bien et le Mal, et à la suite de St Thomas, il convient d’envisager la tolérance comme indissociable de l’intolérance. Mais il est intolérant de classer la tolérance dans le Bien et l’intolérance dans le Mal.

La difficulté pour l'honnête homme est de devoir rechercher en tous lieux et en tout temps les limites de la tolérance comme ses propres limites. C’est la raison pour laquelle on lui demande d’être humble avant d’être tolérant. La recherche perpétuelle de la gnose lui interdit l’expression d’un savoir absolu.

De même, lorsqu’il lui est demandé de voter, il ne lui est pas recommandé de poser un vote tolérant mais de « s’exprimer en son âme et conscience ». Pourquoi ? Parce que ce qui est recherché n’est pas l’expression d’un savoir mais l’expression d’une intime conviction.

Dans l’idée de tolérer (quelque chose ou quelqu’un) il y a un à-priori : c’est que cette chose ou cette personne est dans l’erreur et que nous acceptons de supporter cette erreur pour éviter un plus grand malheur. 


Tolérer, c’est avoir la capacité de pouvoir dire non et dire oui quand même! Cela veut dire que nous sommes conscients d’un pouvoir que nous détenons sur l’autre et que nous acceptons de ne pas l’utiliser.

La tolérance étant une vertu maçonnique, elle est intrinsèquement comprise dans tous les actes du maçon… vote inclus.  Certes. Mais pourquoi le fait de voter « oui » ou « non » ne peut être l’expression d’une tolérance ? Tout simplement parce que lorsque je vote, je ne sais pas si j’ai raison ou tord. Mais j’ai conscience de devoir m’exprimer avec conviction.
C’est d’ailleurs pour cela que je peux accepter le résultat du vote même s’il est opposé à l’expression de ma volonté. Je comprends la bêtise qu’il y aurait à penser que les gagnants ont faits preuve d’intolérance, pas plus qu’ils ne peuvent mettre ma volonté de tolérance en doute pour avoir exprimé un choix contraire.

Personne ne saurait être absolument tolérant, ou absolument intolérant.  Tout  se joue aux limites du supportable. Et comme aucun d’entre nous ne mets les limites du supportable au même endroit, de même la tolérance ne se trouve jamais où on la cherche.


C’est de la diversité que jaillit la lumière, mais à trop mélanger d’ombres à la lumière, il peut devenir difficile de rallumer le feu en chacun de nous. Ainsi peut se comprendre la nécessité absolue de "tolérer".

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